Ce mercredi 15 décembre, M. U., ressortissant kosovar qui résidait
régulièrement en France depuis plus de dix ans avant que le
renouvellement de son titre de séjour « étranger malade » ne lui soit
refusé, a mis fin à ses jours dans les geôles du palais de justice de
Bordeaux.
Alors qu’il avait confié son projet de suicide à plusieurs reprises
le jour du drame, aucune mesure de prévention n’avait été prise. Visé
par une obligation de quitter le territoire français à la suite du
retrait de son titre de séjour, M. U. était poursuivi devant le Tribunal
Correctionnel, en comparution immédiate, pour avoir refusé d’embarquer
dans un avion à destination du Kosovo : la perspective d’être expulsé et
d’y être renvoyé l’a poussé au pire.
C’est le second suicide en lien avec la rétention en quelques
semaines : le 22 novembre 2021, une personne retenue au CRA de Oissel a
tenté de mettre fin à ses jours et est décédée le lendemain des suites
de son geste.
Le recours massif à l’enfermement des personnes étrangères au seul
motif de l’irrégularité de leur situation administrative est la cause
d’innombrables drames que les associations de défense des droits humains
et, avec elles, de nombreux∙ses avocat∙e∙s dénoncent depuis des années.
Pour la plupart d’entre elles, cette privation de liberté est synonyme
d’extrême angoisse, dont le suicide, comme celui de M. U., peut être
l’issue fatale.
Pourtant, les poursuites pénales pour refus d’embarquement - ou pour
refus des tests PCR imposés en vue de l’expulsion - se sont multipliées
depuis plus d’un an, au point d’exploser aujourd’hui, ajoutant à cet
enfermement administratif de lourdes peines d’emprisonnement.
L’acharnement des préfectures à expulser à tout prix obtient ainsi le
soutien de certain∙es Procureur∙e∙s de la République prompt∙e∙s à
déclencher des poursuites et de juridictions prêtes à condamner des
personnes qui redoutent seulement de se retrouver dans un pays qu’elles
ont fui. Ainsi la politique pénale se met-elle au diapason d’une
politique d’immigration et d’asile inhumaine.
Aux dernières nouvelles, un homme, emprisonné au centre pénitentiaire
de Bordeaux-Gradignan, a été hospitalisé alors qu’il menait une grève
de la faim depuis plusieurs semaines après avoir été condamné pour avoir
refusé le test PCR préalable à son expulsion. Combien de nouveaux
drames faudra-t-il dénombrer avant que cette escalade répressive et
disproportionnée soit abandonnée ?
Attentatoire à leurs droits fondamentaux et meurtrière, la criminalisation des personnes étrangères doit prendre fin.
Paris, le 22 décembre 2021